Accueil > Décembre 2014 / N°28

L’éclairage public confié à Vinci ?

Encore une bavure Piollicière ! 

Quel est le rapport entre le nouveau parking de la Villeneuve et les lampadaires de Grenoble ? Entre Margaret Thatcher et Eric Piolle ? Entre la CGT et Jérôme Safar ? Entre le conseiller de Michel Destot et les actions que possèdent Eric Piolle à Soitec ? Entre la ville intelligente et les situationnistes ? Au mois d’octobre, une vive polémique a éclaté autour de la gestion des lampadaires grenoblois. Le Postillon tente d’en tirer quelques enseignements afin d’éclairer votre lanterne.

Avouons que ça n’a pas dû être confortable. Imaginez : vous êtes une équipe municipale censée incarner « l’autre gauche », vous avez fait campagne « pour des services publics locaux », en affirmant que « la démonstration a été faite que la gestion directe était plus efficace que le partenariat avec le privé », vous êtes aux manettes depuis six mois, scruté par tout un tas d’observateurs et de militants et tout d’un coup, patatras : suite à un appel d’offres, l’éclairage public de votre commune, géré depuis 1851 par la société d’économie mixte « maison » Gaz électricité de Grenoble (GEG), passe au privé. En l’occurrence à Citéos : une filiale du géant du CAC 40 Vinci, alliée pour le coup avec une autre multinationale, Bouygues [1] . Forcément, ça la fout mal.
Alors il a fallu développer des trésors de rhétorique ; faire porter la faute à l’ancienne majorité, qui avait rédigé l’appel d’offres deux ans auparavant ; accuser également l’ancien maire Carignon, qui, trente ans auparavant, avait privatisé la régie municipale Gaz électricité de Grenoble (GEG) en la transformant en SEM (Société d’économie mixte) et en en vendant la moitié à GDF-Suez ; dénigrer la SEM GEG en la traitant de « groupe privé qui n’a rien à voir avec le service public » (la ville de Grenoble détient quand même 51 % des parts) ; insister sur les dividendes des actionnaires et la retraite chapeau du président de GDF-Suez ; affirmer que choisir entre GDF-Suez et Vinci, c’est comme choisir entre la peste et le choléra.
Et surtout il a fallu tenir une ligne de défense : on n’a pas le choix, version dérivée du célèbre There is no alternative thatchérien.

Pas d’alternative ?

Sophie Cavagna est la déléguée CGT à GEG. Son syndicat a la réputation d’être « dur ». Il est même accusé par la majorité municipale de faire le jeu politique de l’UMP, du PS et même de GDF-Suez, l’actionnaire de GEG. Toutes ces allégations la font rire jaune, Sophie : « La CGT est un syndicat considéré comme dur parce qu’on ne se laisse pas marcher dessus. Parce qu’on a pas peur de gueuler sur nos patrons et sur les politiques dans l’intérêt des salariés. On ne veut absolument pas être mélangés au jeu politique parce que ceux qui nous brossent dans le sens du poil aujourd’hui, comme Safar, sont ceux qui nous planté des couteaux dans le dos hier ». On la sent sincère, Sophie, aussi sincère que dégoûtée par la ligne de défense de la majorité, ce fameux « on n’avait pas le choix » : « Bien entendu qu’ils avaient le choix ! Cet été, nous savons avec certitude que le dossier d’appel d’offres de l’éclairage public était sur la table du maire. Ils ont décidé, fait un choix politique délibéré de maintenir l’appel d’offres alors qu’ils auraient pu y réfléchir à nouveau, l’arrêter. Ils ont pris le risque que cela soit le 100% privé Citéos-Vinci-Bouygues qui gagne l’appel d’offres alors même qu’ils dénonçaient ce risque en 2012 lors du lancement de la procédure par la précédente majorité. En 2012, l’Ades [NDR : une composante de l’actuelle majorité] avait expliqué pourquoi c’était dangereux d’aller sur un appel d’offres. Logiquement, une fois au pouvoir, ils auraient donc dû l’annuler ou en revoir le fondement. Ils ont essayé de nous faire croire qu’ils n’avaient pas le temps d’annuler ou remettre en cause quoi que ce soit, que c’était aller trop loin dans la procédure, que c’était grave de remettre en cause un appel d’offres public. Mais bien entendu qu’ils auraient pu : ils ont été malhonnêtes de faire croire l’inverse. S’ils avaient avancé par exemple dès cet été, qu’ils voulaient changer le mode de gestion, mettre en place une régie municipale pour l’éclairage public, le motif aurait été recevable par le préfet qui aurait permis de prolonger le marché à GEG le temps de mettre en œuvre le nouveau scénario ».

Alors pour faire comprendre aux élus qu’ils avaient le choix, les salariés de GEG se donnent du mal. Envahissent le conseil d’administration de GEG et mettent la pression sur son président Vincent Fristot (voir son portrait pages 12-13). Réalisent communiqués de presse, banderoles, stickers. Manifestent dans la ville jusqu’à la mairie, juste avant le conseil municipal du 20 octobre. Obligent Éric Piolle à les recevoir juste avant cette séance qui devait entériner le choix de la commission d’appel d’offres – donc confier la gestion de l’éclairage public à Vinci pour les huit prochaines années. Sophie Cavagna raconte : « le maire nous a reçus pour nous dire ‘‘vous pouvez intervenir et lire votre déclaration en conseil municipal mais ça ne sert à rien, tout est bouclé on va délibérer ce soir’’. Un tel mépris, devant quatre cents personnes inquiètes pour leur avenir, ça a forcément excité ». Alors les salariés de GEG ont décidé d’« exposer » leur savoir-faire : les plombs sautent, le conseil municipal est plongé dans le noir, des salariés rentrent en force dans la salle et un cercueil, représentant GEG, est posé sur la table du maire – qui décide finalement d’annuler la séance (voir une analyse de la réaction des élus dans l’encart page 13). La semaine d’après, ce point n’est plus à l’ordre du jour du conseil reporté. Après plusieurs rendez-vous avec les syndicalistes, le maire demande un délai de neuf mois au préfet pour étudier « la faisabilité du scénario régie municipale pour l’éclairage public ». En attendant, GEG continuera à s’occuper des lampadaires - l’entreprise aurait dû arrêter au 1er janvier 2015. « C’est quand même ahurissant, analyse Sophie Cavagna. Juste avant le conseil municipal, on n’avait plus le temps de rien. Aujourd’hui on prend neuf mois pour faire une analyse comparative ». Finalement la bande à Piolle a admis que le choix existait, qu’il y avait des alternatives. Et malgré eux, les rouges-verts ont accrédité cette célèbre maxime militante : « seule la lutte paye ! »

Un manque de courage politique

Ce qui inquiète Sophie Cavagna, c’est le « manque de courage politique » de cette équipe qui avait beaucoup d’ambitions : « Ils sont incohérents car ils ont toujours porté une conception du service public, et alors qu’ils ont la possibilité d’envisager l’éclairage public en régie municipale, ils ne le font pas. Pourquoi ? Ils n’ont pas eu de honte à assumer une décision en opposition totale avec ce qu’ils portent. Autant le plan de performance [NDR : plan porté par l’ancienne municipalité pour GEG prévoyant soixante-deux suppressions de poste et de nombreuses externalisation d’activités historiques], bon c’était pas mieux, la CGT s’est battu ardemment contre, mais Destot et Safar assumaient clairement leur projet porté main dans la main avec GDF-Suez qui était cohérent avec leur ligne politique de l’époque. Ceux de la nouvelle majorité parlent de courage politique, mais n’en ont pas fait preuve jusqu’à la demande du délai de neuf mois au préfet. C’est pour ça que c’est hyper inquiétant pour plein d’autres thèmes notamment en ce qui concerne l’avenir de GEG dans son ensemble demain dans la Métropole ». S’ils manquent de courage politique, les élus rouges & verts ont en tous cas une admirable rhétorique. Pour eux, confier l’éclairage public à Vinci ne remet pas du tout en cause leur volonté de faire un « service public de l’énergie » à l’échelle de la Métro d’ici quelques années. C’est cette même rhétorique qui a permis au conseil municipal de confier la gestion du nouveau parking de l’Arlequin à Effia - alors que les anciens parkings était gérés jusque là par une régie municipale et que la liste « Grenoble, une ville pour tous » s’était engagée à « retirer au secteur privé la gestion des parkings ». « Nous allons maintenir le cap » ont-ils alors assurés (voir encart). Privatiser certaines parties, est-ce vraiment le meilleur moyen de municipaliser l’ensemble ?

Peut-être que leur courage politique n’est pas à l’endroit attendu. Pas pour combattre les multinationales, pas pour défendre le service public, mais pour aboutir à des résultats éco-techniques. Pour l’éclairage public, la volonté de la nouvelle équipe municipale est avant tout de mettre en œuvre le Plan Lumière de la ville qui « fixe l’objectif de diviser au moins par deux la consommation d’énergie dédiée à l’éclairage public sur la commune de Grenoble à l’horizon 2022 (11,4 GWh en 2013, soit un coût actuel pour les Grenoblois de près de 1,5 millions d’euros) ». Réduire l’intensité et le coût de l’éclairage public ? L’intention est louable. Mais cette petite ambition (il y a bien plus dispendieux comme gouffre énergétique – voir page 13) doit-elle être plus importante que la lutte contre les grands groupes privés ? « Il est possible qu’au terme des neuf mois d’études, ils nous disent que la régie ne permettra pas d’atteindre leur Plan lumières alors que continuer l’appel d’offres le permet [NDR : parce que Vinci a plus de ‘‘compétences’’]. C’est vraiment ça leur objectif, ils n’ont pas arrêté de dire qu’ils tenaient beaucoup à cet engagement de campagne, même quand on leur rappelait leurs autres promesses comme l’annulation des suppressions de postes à GEG ou la mise en place d’un service public de l’énergie. » [2]. L’écologie doit-elle aller contre le social ? Question primordiale qu’on avait effleurée lors d’un débat avec des syndicalistes de STMicroelectronics (voir Le Postillon n°20). Mais là, elle ne se pose même pas : le choix de confier l’éclairage public à Vinci n’est pas « social », bien entendu, mais pas « écologique » non plus, comme on va le voir.

Des « PME locales » pour un éclairage « intelligent »

C’est Jacques Wiart - président de la commission d’appel d’offres (CAO) et adjoint aux déplacements et à la très charmante « logistique urbaine » - qui devait défendre la délibération au conseil municipal annulé. Nous lui avons donc demandé de nous expliquer les raisons qui avaient poussé la CAO à donner des meilleures notes à Vinci plutôt qu’à GEG. Il nous a montré le Powerpoint qu’il avait prévu de présenter au conseil. Parmi toutes les raisons défendant le choix de Citeos, l’une d’entre elles a attiré notre attention : c’est « l’implication de PME locales : Soitec, BH technologies, l’Agence Lumières, Régie de Quartier Villeneuve ». Selon Jacques Wiart, cet aspect « a joué, c’était un atout de cette proposition ».
Le monde est petit, surtout Grenoble. Ces « PME locales » ne sont donc pas inconnues dans les lieux de pouvoir grenoblois. L’Agence Lumière s’est occupé d’illuminer le « phare urbain » de Pont-de-Claix, le récent caprice du maire Christophe Ferrari (voir Le Postillon n°22). Peut-être cette petite entreprise a-t-elle conservé des bons rapports avec le nouveau président de la Métro, allié d’Eric Piolle. BH Technologies possède depuis juillet un nouveau « responsable commercial » et « responsable de la communication » dénommé David Bousquet, qui est le conseiller de Michel Destot, l’ancien maire de Grenoble, celui qui a lancé l’appel d’offres. On peut imaginer qu’il a gardé quelques contacts à la mairie. Soitec n’est pas une « PME locale » mais un groupe côté en Bourse employant 1 200 personnes, au chiffre d’affaires de 247 millions d’euros en 2013-2014. Parmi ses actionnaires, on retrouve un certain... Eric Piolle, le maire de Grenoble. Ses actions, il ne les avait d’ailleurs pas déclarées dans sa déclaration de patrimoine mais les a révélées maladroitement en se défendant suite à la polémique Raise Partner : « J’ai aussi des parts dans la société Soitec » (Le Daubé, 7/07/2014).

Est-ce que ces éléments ont joué dans le choix de la commission d’appel d’offres ? On n’en sait fichtrement rien. Ce qui est sûr, c’est qu’ils sèment le doute sur la ligne de défense de la majorité municipale. Elle a beaucoup insisté pour dire qu’elle n’avait pas le droit de défendre GEG (dans laquelle la Ville détient 51 % des parts) par rapport à Vinci, parce que ça aurait été du conflit d’intérêts. Mais cette « implication de PME locales » mise en avant peut éveiller quelques soupçons.

GEG, Vinci, Soitec, BH technologies font partie du Cluster Lumières, « le réseau de compétences de la filière éclairage », basé à Lyon. Mais les trois derniers travaillent déjà ensemble dans le cadre d’une expérimentation menée à Aix-les-bains. Son but est de développer « l’éclairage public intelligent et durable », et la « ville intelligente ». En matière d’éclairage, comme partout ailleurs, la fameuse « intelligence » consiste à rendre indispensables une quantité de capteurs. Concrètement, ça donne ça : « Des capteurs magnétiques ultra compacts autonomes en énergie permettent de détecter la présence d’un usager et d’adapter le niveau d’éclairage en fonction de son passage (piéton, cycliste, jogger, véhicule). Les informations identifiées sont communiquées à la solution de pilotage par technologie radio, sans fil. Le dispositif est complété par des détecteurs de présence raccordés à un automate. Chaque nuit, les consommations sont enregistrées par la supervision pour être ensuite analysées ».

Comme d’habitude avec toutes les innovations « intelligentes », il s’agit de collecter un maximum de données, de renseignements, puis de rationaliser, optimiser, gérer mieux grâce à des logiciels et des algorithmes. Comme d’habitude, il s’agit de remplacer les humains par des machines. Comme d’habitude, on n’évoque jamais les possibilités sécuritaires qu’entraîne cette « intelligence » – si on peut reconnaître un « jogger » et l’éclairer en conséquence, la machine pourra également détecter un comportement « suspect » (au moins les couvre-feux seront plus faciles à organiser). Comme d’habitude, on met en avant une volonté « écologique » - éclairer « plus intelligent » - sans jamais parler du coût écologique de tous ces « capteurs magnétiques », « détecteurs de présence », « radars » et autres « collecteurs d’informations ». Comme d’habitude, le but est avant tout d’être « à la pointe de l’innovation », peu importe le sens.

Quitte à vouloir « innover », la mairie de Grenoble devrait aller contre le sens du vent « intelligent » et reprendre une des propositions des lettristes (des révolutionnaires des années 1950) : installer des interrupteurs sur tous les lampadaires des villes. Leur but n’était pas de vendre de la camelote électronique, mais de briser l’organisation de la ville pour faire naître des situations passionantes. Mais c’est vrai que ce point ne faisait pas partie du programme d’Éric Piolle.

Récapitulatif éclairant

Pour les personnes ayant le bon goût – mais néanmoins le manque de curiosité – de ne s’informer localement que par Le Postillon, voici un petit récapitulatif des événements récents autour de l’éclairage public grenoblois.

  • GEG (Gaz et électricité de Grenoble) gère l’éclairage public depuis presque toujours à Grenoble. « L’histoire de GEG a commencé en 1851 par l’éclairage public ».
  • En 1994, Raymond Avrillier engage un recours pour contester le fait que, dans le cadre de la concession de la distribution du gaz et de l’électricité à GEG (société à moitié privatisée depuis 1986) ce sont tous les usagers (au lieu des contribuables) qui paient l’éclairage public.
  • En 2009, le Conseil d’état donne raison à Avrillier et enjoint la Ville de trouver une solution dans un délai de 9 mois. Ce qu’elle fait en signant un nouvel avenant à la concession GEG-Ville : ce n’est qu’un artifice comptable permettant de continuer de faire payer l’éclairage public par les usagers. Des recours ont été déposés et sont encore en cours d’instruction.
  • Finalement, en octobre 2012, pour sortir la gestion de l’éclairage public du contrat GEG, la municipalité Destot décide de lancer un appel d’offres de type CREM (Conception Réalisation Exploitation Maintenance) dans lequel GEG pourra concourir.
  • Début 2014, deux sociétés sont admises à concourir dans le cadre d’une procédure de type « dialogue compétitif » : GEG et Citéos/Vinci.
  • Pendant l’été 2014, des techniciens notent les deux candidatures et Vinci l’emporte. La commission d’appel d’offres, composée de quatre élus de la majorité, un socialiste et un de droite, entérine ce choix : Vinci l’emporte « à l’unanimité ».
  • Le 14 octobre 2014, les salariés de GEG envahissent le conseil d’administration pour exprimer leur colère.
  • Le 20 octobre 2014, le conseil municipal devait entériner le choix de confier l’éclairage public à Vinci. Au bout de quelques minutes, il est interrompu par une manifestation des agents de GEG qui ont également coupé le courant. Le conseil est reporté à la semaine d’après, et le point sur l’éclairage public enlevé de l’ordre du jour.
  • Novembre 2014 : suite à plusieurs réunions entre les élus et les syndicats, la mairie accepte de demander un report de neuf mois au préfet (et donc que GEG gère l’éclairage public jusque là) afin d’étudier le scénario de la régie municipale.
Un parking confié à Effia :comment privatiser pour mieux municipaliser ?

Si l’éclairage public est géré par Vinci pour les huit prochaines années, « le service public de l’énergie » promis par la liste « Grenoble, une ville pour tous » est plutôt mal barré, non ? « Mais pas du tout » pourraient répondre en chœur les élus. Pour eux, le choix de confier l’éclairage public à Vinci ne remet rien en cause, c’est un événement anecdotique, qui n’affaiblit nullement leur projet de faire un « service public de l’énergie » à l’échelle de La Métro d’ici quelques années.
Curieux raisonnement que l’équipe municipale semble appliquer avec constance dans d’autres domaines : pour l’éclairage public comme pour les parkings. La liste Grenoble une ville pour tous avait promis (engagement n°50) de « retirer au secteur privé la gestion des parkings ». Curieusement, elle vient de faire l’inverse en votant, au conseil municipal du 27 octobre, la délégation de la gestion du nouveau parking de l’Arlequin (dit 3-4-5, qui vient d’être reconstruit devant feu le 50 galerie de l’Arlequin) à Effia alors que celle des anciens silos était auparavant assurée directement par la ville. Pourquoi ? Pour l’élue Claire Kirkyacharian, qui a défendu cette délibération : « Il s’est avéré que la gestion directe pour ce seul silo 3-4-5 aurait été impossible à organiser d’ici janvier. D’une part, elle nous aurait demandé un effort financier immédiat important qui aurait comporté un risque supplémentaire du fait de la modification contractuelle. D’autre part, elle aurait pénalisé les habitants de la Villeneuve en retardant l’ouverture de plusieurs mois ». Il serait donc plus avantageux pour les habitants d’avoir tout de suite un parking régi par une boîte privée, plutôt que d’attendre encore quelques mois pour l’avoir en régie municipale. Et ce d’autant plus que ce choix s’accompagne d’une augmentation des prix de 100% : pour un box fermé, le loyer passe de 30 euros à 60 euros (1). Interpellé dans la rue, un élu de la majorité, pas d’accord avec cette décision mais voulant rester anonyme, raconte son trouble : « C’est vraiment bizarre. On a fait plein de réunions pour débattre de ça, mais certains poussaient vraiment fort pour confier la gestion à Effia. Les services ont même bidonné des chiffres grossièrement, pour faire croire que ça pourrait être un gouffre financier pour la ville. Au final, c’est le maire et certains élus qui ont imposé le choix d’Effia à tout le groupe ». Comme elle est loin la campagne avec son slogan : « Un maire, une équipe » ou la « bande de copains » tant vantée dans la presse… On a voulu en savoir plus sur ce qui a l’air d’avoir été un point de tension à l’intérieur de la majorité. Mais Claire Kirkyacharian n’a pas trouvé le temps - en deux semaines - de nous recevoir (ah ! la vie overbookée des élu.e.s) et a simplement répondu par mail : « L’engagement que nous avons pris est de sortir l’ensemble des parkings grenoblois de la gestion privée, et ce en 2018. C’ est toujours indéfectiblement notre cap. (…) La meilleure façon d’atteindre notre objectif est de ne pas faire passer ce seul parking en régie. Cela serait prendre le risque de ne pas pouvoir, à terme au sein de la métropole, sortir l’ensemble des parkings de la gestion privée ». Cette technique singulière - privatiser des petites parties pour mieux municipaliser l’ensemble - est visiblement une des bases du piollisme.

(1) Et de 30 à 45 euros pour un box grillagé, c’est-à-dire avec contenu totalement visible. Il faut savoir que les boxes des anciens silos de parkings situés face au 20 et 90, galerie de l’Arlequin (silo 3, 4 et 5) étaient eux fermés.

Notes

[1Pour simplifier, nous dirons simplement Vinci dans le reste du texte.

[2Les derniers propos de Lucille Lheureux, adjointe à l’espace public, ne rassureront pas les salariés de GEG : « Cela n’enlève en rien notre volonté d’étudier jusqu’au bout le scénario d’une gestion directe en régie de l’éclairage. Nous pourrons alors choisir le dispositif le plus adapté pour développer notre Plan lumière, auquel je suis particulièrement attachée comme adjointe à l’espace public, qui a pour objectif de baisser les consommations d’énergie, diminuer la pollution lumineuse, concourir à la tranquillité publique et améliorer l’éclairage à Grenoble. » (France Bleue Isère, 19/11)