Accueil > Octobre 2016 / N°37

Galerie de l’Arlequin : détruire, disent-ils

Au Postillon, on ne comprend pas trop : cela fait des années que la Tour Perret se casse la gueule et qu’on ne la fait pas tomber. Mais par contre, les autorités mettent beaucoup d’argent public pour démolir des bâtiments en parfait état. Les « plans de sauvegarde » se multiplient dans Grenoble. Après celui des services publics, voilà venu celui de la galerie de l’Arlequin. Et là aussi, en guise de « sauvegarde », il s’agit avant tout de détruire. Après avoir dépensé des millions d’euros pour raser le 50, galerie de l’Arlequin (ce qui devait permettre d’« ouvrir le quartier sur l’extérieur », avec le succès que l’on sait...), la préfecture et la mairie ont annoncé leur intention de détruire le numéro 160. Depuis 2012, cette ancienne maison de retraite est vide. Un seul étage, comprenant 27 logements, est utilisé comme résidence d’artistes pour la MC2. Mais quel est l’intérêt de détruire ces dizaines de logements en bon état ? Sur le site du Crieur de la Villeneuve, on découvre les réactions des habitants : « Ce projet ‘‘vient d’en haut, sans discussion possible’’, raconte Gérard. ‘‘Un truc de technostructures’’, résume Pierre  ». Mais on y apprend également que c’est une « issue incontournable » pour la préfecture afin de construire des escaliers de secours du 150 et 170. Pour deux escaliers, on va ainsi gaspiller 26 millions d’euros - soit deux années de baisse de dotations de l’État pour la mairie de Grenoble ! Le Crieur analyse les véritables enjeux de cette démolition, visant à réduire le nombre de logements sociaux à la Villeneuve : « Le plan de sauvegarde s’inscrit dans une logique de chasse aux pauvres assumée par les pouvoirs publics. ‘‘Les principes d’intervention du volet habitat ont été arrêtés et visent à créer des ensembles de plus petite taille, mieux gérables et autonomes, […] permettant de réduire le taux de logement social pour tendre vers 60 %’’, écrit La Métro ». En cassant des coursives, il y a également des enjeux sécuritaires, comme dans tous les projets de l’ANRU (agence nationale de la rénovation urbaine) : «  ‘‘Les consignes ont déjà commencé à être intégrées dans les rénovations urbaines conduites depuis 2003. Une convention lie même l’ANRU et le ministère de l’Intérieur depuis 2006. Les préfets, en particulier, se font les relais, très efficaces, des analyses policières’’, écrivait Le Monde en 2008 ». Ce plan de « sauvegarde », qui comprend également la rénovation thermique des appartements, met en tout cas en danger nombre de « petits » copropriétaires des montées voisines (150, 170), dont beaucoup vont avoir le plus grand mal à payer les dizaines de milliers d’euros nécessaires aux travaux. Ils devraient au moins avoir la satisfaction de participer au sauvetage de la filière du BTP.