Le Bistrot des 1 000 Vaches
L’article du dernier numéro sur le Minimistan, tiers-lieu summum de la branchitude grenobloise, a suscité diverses réactions dont ces deux-là :
« Une remarque sur votre article sur le Minimistan : j’aurais aimé plus de chiffres sourcés pour continuer de confirmer cette fumisterie, notamment sur le financement original du lieu, ou des données permettant de démontrer la vampirisation économique sur le quartier. Je sors de la lecture avec une confirmation de mon ressenti sur ce lieu, mais elle provient plus d’une ambiance générale que de chiffres. Par ailleurs je trouve toujours aussi malaisant l’accueil dans ce lieu par un vigile pour fouiller les sacs (et surtout être sûr que tu n’apportes pas de nourriture avec toi...). En tout cas, continuez de postillonner partout ! » Q.
« J’ai une réflexion à vous soumettre. Pourquoi la ferme des 1 000 vaches a-t-elle suscité autant d’émotions et de commentaires alors que le Minimistan semble susciter plutôt de l’enthousiasme chez certaines personnes ? Pourtant il me semble que le projet est le même. Et les conséquences toutes identiques : la mort des petites exploitations. » Un adepte des petits bistrots de quartier.
Trop de TSA ?
Un retour sur l’interview de la psychologue paru dans le dernier numéro :
« Je ne remets pas en question le fond des propos de la psychologue ni le message global de l’article, qui soulève plein de choses intéressantes. Mais je me permets d’ajouter quelques éléments, car je connais bien le sujet de l’autisme et de l’école inclusive. [...] Un point m’a interpellée : la remarque selon laquelle le TSA [trouble du spectre autistique] serait aujourd’hui beaucoup diagnostiqué, presque comme un phénomène de société. Je n’ai pas la prétention de savoir mieux qu’une professionnelle de terrain, mais je pense qu’il est essentiel de ne pas glisser vers l’idée que le TSA serait devenu une sorte de “fourre-tout”. Ce type de discours peut, involontairement, décrédibiliser les personnes réellement concernées, alors que leur parcours de reconnaissance est déjà long, complexe, et souvent douloureux. Bien sûr, certaines institutions sont dysfonctionnelles. Mais on ne peut pas ignorer les progrès : la recherche avance, des formations se développent, et des professionnels s’engagent. Cela mérite d’être souligné. Je souhaite simplement soutenir toutes celles et ceux qui vivent avec un TSA, souvent invisibilisé.es, mal compris.es, ou suspecté.es de “surjouer”. Ce combat pour la reconnaissance est aussi un combat pour la dignité et le droit de chaque individu à exister pleinement, dans une société trop normée, comme cela est d’ailleurs bien exprimé dans votre article. » M.
La critique d’une plouc
« Je lis Le Postillon de temps en temps chez mon fils. J’apprécie beaucoup le contenu mais j’ai du mal à supporter le ton de mépris et d’arrogance de la plupart des articles. “Si vous ne pensez pas comme nous, vous êtes un vrai plouc.” C’est la raison pour laquelle je ne l’achète pas, mais je vais néanmoins le laisser à la gare en espérant le faire découvrir par un futur abonné ! » C.
Le Postillon : Justement on essaye de ne pas avoir ce ton, à part envers les gens qu’on considère comme l’opposé des ploucs, à savoir par exemple les nantis promoteurs de la révolution numérique et de la start-up nation. Nos demandes de précisions sur des exemples de ce « ton de mépris et d’arrogance » sont restées sans réponse.
Le Rabot se meurt
C’était le dernier été de la résidence étudiante du Rabot, située dans des bâtiments militaires des pentes de la Bastille. Alors que le futur de ces bâtiments n’est toujours pas décidé, certains anciens ou actuels résidents regrettent amèrement la fin de cette résidence étudiante trop originale pour perdurer dans un monde universitaire trop normé. C’est le sujet du courrier d’Alice, envoyé début juillet :
« Il reste 30 étudiants. 30 fenêtres qui brillent dans la nuit de la colline noire, 30 fenêtres ouvertes sur l’univers à la fois intime et uniforme d’une chambre Crous. 30 personnes qui font encore battre le cœur du paquebot. Pour qui le fort reste encore leur toit, leur foyer, leur maison. 30 personnes pour qui les couloirs restent éclairés, les grilles ouvertes le matin, les draps posés à l’accueil le 5 du mois.
L’été a toujours été synonyme de désert au Rabot. La moitié des bâtiments fermait. La chaleur écrasante faisait fondre le goudron et onduler l’horizon. Et les quelques irréductibles se croisaient au détour d’un escalier ou d’un couloir, les portes ouvertes sur les ventilateurs vrombissants.
Mais cet été, le soir du 30 août 2025 le Rabot s’éteindra. Les derniers états des lieux seront faits, les lumières s’éteindront et les portes se fermeront une dernière fois. Plus personne ne fera craquer le plancher d’Esclangon. Plus personne n’ira chercher le courrier s’empilant déjà dans les boîtes aux lettres. J’aurais voulu que cet endroit reste un refuge, un lieu d’émancipation et même parfois une famille pour les étudiants du monde entier. Comme il le fut pour moi et pour tant d’autres.
Le Rabot n’a jamais intéressé personne. Je l’ai toujours connu vétuste et délabré. C’est ce qui nous a permis de le faire nôtre. Ce soir, au détour de notre héritage, des Nerfs à eau de l’asso étudiante achetés en 2016, on mouille les couloirs, on boit des canettes à la lueur des bougies dans les caves de la colline dont seuls les Rabotins ont le secret. On savoure une dernière fois nos pintes à 2€ sur la plus belle et plus accessible terrasse de la Métropole. Il y a un quelque chose. Un lien commun qui unit tous les étudiants ce soir là, quelle que soit l’époque à laquelle le Rabot fut leur maison. Nos fantômes hanteront vos terrasses panoramiques. »
Se moquer des autres et de soi-même
« Petit message de soutien à l’illustratrice du précédent numéro représentant l’origine du monde. Ce montage est l’un des plus drôles et des plus percutants de ces dernières années en matière de dessins de presse critiques. Alors merci merci merci. Je suis bien désolé qu’il ait blessé des gens... Mais il faut continuer à être “provoc” sinon on va perdre la capacité à se moquer des autres et de nous-mêmes. Ce qui serait terriblement triste et inquiétant. Et 1 000 mercis pour votre canard qui est un rayon de soleil dans la merde ambiante. » T.

