Si tu habites Grenoble, tu sais donc que nous vivons ici sous le règne d’un Dieu unique qui se dénomme Innovation. Pour lui faire honneur, tout est permis. Sacrifier la terre, l’eau et l’air. Bouleverser les rapports sociaux et les modes de vie. Ne pas se poser de questions sur le sens de l’activité humaine.
Dans la cuvette, toutes les semaines ou presque, un projet naît en l’honneur du Dieu Innovation. Certains arrivent à sortir du lot, à faire parler d’eux. Une des entreprises qui squatte les médias locaux ces dernières mois s’appelle Delta Drone. Perspicace comme tu es, tu auras deviné que cette entreprise fabrique des drones, ce qui signifie « faux bourdon » en anglais et qui désigne, selon le Larousse des « petits avions télécommandés utilisés pour des tâches diverses (missions de reconnaissance tactique à haute altitude, surveillance du champ de bataille et guerre électronique) ».
Tu me diras, ça fait déjà un moment qu’on en entend parler, des drones, et donc ce n’est pas très innovant. C’est vrai. Mais la spécificité de Delta Drone, c’est de vouloir faire du business avec des drones « civils ».
Car pour l’instant, le drone est surtout connu pour être un outil militaire, particulièrement prisé par l’armée américaine. Et figure-toi qu’il simplifie bien la vie des Yankees : il permet de passer outre quelques formalités administratives et de réaliser des tas d’assassinats « ciblés » dans des pays où leur armée n’a officiellement rien à faire. Ce petit objet ne se contente pas d’avoir une efficacité remarquable (déjà près de 5000 morts selon un sénateur américain) mais en plus il bouleverse la manière de faire la guerre. En leur temps, le lance-pierres, l’arc et la flèche, l’arbalète, la catapulte ou le canon avaient déjà modifié les enjeux d’un affrontement, en permettant d’éviter le corps-à-corps. Avec le drone, on assiste à ce qui s’appelle une rupture technologique. Un militaire américain en plein cœur du Nevada peut éliminer d’un seul clic un supposé terroriste au Yémen ou au Pakistan. « Un officier de l’Air Force, David Deptula, en a énoncé la maxime stratégique fondamentale : ‘‘Le véritable avantage des systèmes d’aéronefs sans pilote, c’est de permettre de projeter du pouvoir sans projeter de vulnérabilité’’. (…) Cette tentative d’éradication de toute réciprocité dans l’exposition à la violence dans l’hostilité reconfigure non seulement la conduite matérielle de la violence armée, techniquement, tactiquement, psychiquement, mais aussi les principes traditionnels d’un ethos militaire officiellement fondé sur la bravoure et l’esprit de sacrifice. À l’aune des catégories classiques, le drone apparaît comme l’arme du lâche. Cela n’empêche pas ses partisans de la proclamer être l’arme la plus éthique que l’humanité ait jamais connue » [2].
Ce petit engin volant commence à susciter beaucoup de controverses, potentiellement dévastatrices pour son image marketing. Pour l’instant, les réactions indignées des personnes à la sensibilité trop idéaliste n’ont rien changé du tout. Il n’empêche que le drone militaire jouit d’une réputation sulfureuse. D’où l’idée géniale des créateurs de Delta Drone de se positionner sur le créneau du drone civil. Comme ça, pas de polémique. Et en plus, il y a, comme on dit, « un marché » : « Les drones militaires sont au cœur des conflits contemporains (…). Ils représentent un marché en pleine expansion, mais celui des drones civils, encore balbutiant, pourrait exploser, notamment aux États-Unis » (Le Monde, 12/04/2013).
Les trouves-tu beaux, les noms d’entreprises grenobloises ? Ces mots barbares, comme Arjowiggins, Atos Worldgride, Bespoon, CyXplus, e2v semiconductors, Nexio, Trixell ? Cela te parle-t-il ? Personnellement j’avoue rester souvent dubitatif. Je me suis ainsi longtemps demandé pourquoi « Delta Drone ». « SuperDrone », « Dronics », « Dronatec », « Dronadaire », j’aurais compris (sans pour autant trouver ça joli) mais là je ne comprends pas ce que le Delta vient faire là-dedans. J’ai un peu cherché. Est-ce que ça fait référence à la guêpe maçonne Delta, surtout présente en Afrique tropicale et en Asie ? Y-a-t-il un rapport avec le symbole franc-maçon Delta « triangle créateur, incarnation de lois d’harmonie concrétisées dans les œuvres architecturales érigées par des bâtisseurs initiés », celui qui est « lié à l’œil dans son esprit créateur : voir, voir réellement, n’est-ce pas façonner, recréer, poursuivre l’œuvre du Grand Architecte de l’Univers » [3] ? Ou est-ce un hommage à la Delta Force, unité des forces spéciales américaines ? Mystère.
Qui s’intéresse un peu à la question sait depuis longtemps que les technologies militaires et civiles sont étroitement liées. Que l’une et l’autre s’alimentent et œuvrent à la construction du même monde. Pour se démarquer un maximum de l’image guerrière des drones l’ingénue boîte grenobloise dit vouloir « mettre le drone au service de l’homme ». Traduction : qu’il devienne indispensable, comme le prétend sa communication : « À l’instar des ruptures technologiques qui ont bouleversé l’humanité au cours des quinze dernières années, dont la plus emblématique est le téléphone mobile, c’est avec le drone civil qu’il va falloir compter dorénavant. (…) Comme l’affirme la Direction générale des entreprises dans un rapport de 2010 : ‘‘Le drone sera à l’aéronautique ce qu’est devenu le téléphone mobile à la téléphonie fixe’’. (…) Demain, toutes les entreprises utiliseront des drones pour des raisons que personne n’a encore imaginées. Notre mission est de banaliser l’utilisation du drone et d’évangéliser tous les métiers » [4].
Malins, les créateurs de Delta Drone ont crée leur boîte avant que la DGAC (Direction générale de l’aviation civile) n’autorise les drones à voler dans l’espace aérien français. Quand ce fut le cas, en avril 2012, ils avaient donc un coup d’avance sur leurs concurrents potentiels. Nouvelle ruse : afin d’« évangéliser » le bon peuple ignorant, Delta Drone a mis en place la première « école française du drone, dont l’ambition est de former des télé-pilotes professionnels », ce qui leur assure pour l’instant le monopole sur la formation des futurs pilotes (donc clients) de drones.
C’est seulement au début de l’année 2013, près de deux ans après sa création, que Delta Drone s’est mise à fabriquer à la chaîne ses « Drones 2.0 », une marque bien entendu « déposée ». Le CEO (Chief Executive Officer) promet : « Nous aurons produit, d’ici la fin de l’année 2013, 200 drones, et l’objectif, pour 2014, est de 500. Ce qui est énorme quand on sait que la plupart des autres sociétés fabriquant des drones civils sont à quelques exemplaires par an » (Le Daubé, 3/03/2013). Tellement énorme que la société, qui n’a pour l’instant pas vendu grand chose, veut déjà « s’introduire en Bourse sur Alternext. Delta Drone a procédé à l’enregistrement de son document de base auprès de l’Autorité des marchés financiers » (Les Échos, 16/05/2013). Selon le site La lettre A (30/05/2013), cette nouvelle a « suscité l’intérêt des fonds Google Ventures et Andressen Horowitz, qui comptent investir 10,7 millions d’euros dans cette société ». Cette entrée en bourse est en tous cas encore une démonstration de leur volonté d’être « au service de l’homme ».
Tu n’es pas sans savoir que ce genre de projet philanthropique est généralement porté par des grands hommes. Pour Delta Drone, le big boss s’appelle Frédéric Serre et dans l’éditorial de son dossier de presse se revendique modestement dans la lignée de grands personnages : « Léonard de Vinci, Saint-Exupéry, Stan Lee, Steven Spielberg, Steve Jobs... l’esprit de ces personnages, héros de l’innovation, guide et inspire probablement l’ambition de Delta Drone ». Pour rassasier son ambition, ce jeune quarantenaire se définit comme un « serial entrepreneur » et a déjà monté plusieurs entreprises. La dernière s’appelait Supertec et élaborait « des outils et solutions dans le domaine de la CLV (communication sur le lieu de vente) intelligente et interactive. Ces outils sont basés sur le déploiement d’écrans sur un ou plusieurs lieux de vente qui analysent le comportement des clients et diffusent des contenus audiovisuels ciblés » (communiqué de Supertec du 17/09/2007). On le voit, une activité encore et toujours « au service de l’homme »... et de l’invasion des écrans-mouchards. Ses complices, co-fondateurs de la société, sont du même acabit : Christian Viguié a été un très désintéressé consultant financier, Guillaume Pollin a officié en tant qu’altruiste directeur industriel chez le marchand d’armes Thalès, et Fabien Blanc-Paques a œuvré « à l’international » dans le très charitable secteur des transferts de technologies des laboratoires publics vers des entreprises privées (c’est lui qui a monté dans son garage le prototype du drone commercialisé par la boîte). Leurs collègues et les membres de leur conseil de surveillance ont également servi l’intérêt général dans des entreprises flamboyantes, de Danone à Chanel en passant par Le Figaro.
Ces « profils professionnels », comme on dit à Pôle emploi, sont communs dans notre bonne région. Là-dessus, Delta Drone n’a rien d’innovant. L’entreprise est même un produit-type du « laboratoire grenoblois ». Sa vidéo de présentation ressasse le premier verset de la bible des entrepreneurs isérois : « Cette implantation à Grenoble, berceau des micro et nanotechnologies, lui permet de bénéficier de la proximité des prestigieux laboratoires de recherche ». Delta Drone a su avec habileté profiter des collectivités publiques : la ville de Grenoble lui loue ses locaux dans le nouveau quartier branché de Bouchayer-Viallet alors que la région Rhône-Alpes, avec la banque publique Oséo, lui a gentiment octroyé « 750 000 euros d’avance remboursable » [5]. Sa technologie a été mise au point grâce aux institutions locales que sont le CEA-Leti, l’Inria ou Maya Technologies. Elle fait partie du pôle de compétitivité mondial Minalogic, qui la classe d’ailleurs dans la catégorie « aéronautique militaire et espace » (oui, oui, « militaire »).
Fort logiquement, elle a su recueillir les applaudissements enthousiastes de tous les édiles locaux. C’est même Geneviève Fioraso, alors députée et multi-adjointe à Grenoble, qui s’est occupé de trouver de l’argent pour le développement de la start-up. La chargée de communication nous a assuré que « Fioraso a vraiment apporté un soutien actif pour les levées de fond. Elle a aidé le créateur, Frédéric Serre, en termes d’image et de communication. Elle a joué, si vous voulez, un rôle de prescripteur » [6]. Cette petite entreprise embauchant seulement trente-trois personnes [7] fin mars 2013 (alors qu’elle claironne souvent dans la presse employer « une cinquantaine de personnes ») a ainsi eu l’honneur d’une visite de deux ministres en avril dernier. L’occasion pour le dépité-maire Destot de saluer sa « croissance inédite » et pour Geneviève Fioraso, en tant que ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, d’exposer toute la finesse de sa philosophie : « une entreprise c’est de la technologie, c’est essentiel donc il faut de la science, de la recherche mais il faut aussi avoir l’usage car l’usage c’est le marketing et donc c’est ce qui se vend » (France 3, 12/04/2013).
Et donc au fait, qu’est-ce qu’il se vend chez Delta Drone ? On en est déjà à la moitié de l’article, je me perds en considérations biographiques et étymologiques, et je ne t’ai toujours pas dit à quoi servaient les fameux drones « civils ». Delta Drone s’est pour l’instant positionné sur plusieurs « marchés » ou elle aimerait, non pas vendre, mais louer ses petits joujoux pour des durées allant de quelques heures à plusieurs mois. En 2012, l’entreprise a habilement lancé sa campagne de communication en assurant que les drones pouvaient permettre de localiser des personnes prises dans une avalanche. Passons rapidement sur cette affirmation sans doute prétentieuse quand on sait que le drone 2.0 a une autonomie de trente minutes, et ne peut pas voler avec un vent supérieur à 25km/h, vitesse bien souvent dépassée en altitude. Dans la même série, Delta Drone prétend également pouvoir apporter « une assistance aux déclenchements d’avalanches, des relevés topographiques, une mesure de la hauteur de neige, des supervisions des installations ». La jeune pousse s’est également positionnée sur les secteurs de :
- « l’inspection industrielle » des grands ouvrages (barrages, centrales nucléaires, etc) ;
- « la surveillance des réseaux », notamment des pylônes et des lignes à haute tension (un contrat signé avec ERDF) ;
- « l’inspection des carrières » (un contrat signé avec Granulat Vicat) ;
- l’aide à « l’agriculture céréalière », afin de permettre l’« étude et le suivi de croissance, l’évaluation de la biomasse, l’analyse de parcelles défectueuses », soit à peu près le stade ultime de la mécanisation de l’agriculture ;
- le loisir, en proposant à des lieux touristiques de prendre des photos de haut pour leur communication, mais aussi aux vacanciers de ramener des souvenirs de vacances originaux. Delta Drone propose aussi « un système innovant de tracker (bracelet) qui est porté par une personne lors d’un exercice sportif ou de loisir, cette dernière devenant alors la cible du drone qui la suit dans toutes ses évolutions. Afin de se conformer à la réglementation de la CNIL, le visage des personnes non porteuses du bracelet, évoluant dans l’environnement du drone, est flouté. La vidéo tournée pour l’occasion devient alors un souvenir de vacances, téléchargeable sur tout support numérique (moyennant une participation financière de la personne) ». Souriez, vous être tracké !
- le sport, en filmant les matchs et entraînements de haut ce qui est censé aider les sportifs et leurs entraîneurs à progresser. Une bonne œuvre qui a séduit le club de rugby grenoblois et qui a permis à Delta Drone de faire sa « première mondiale ! La dépose du ballon du match FCG/Toulon (NDR : par un drone) en live sur Canal plus ! » (sur le compte twitter de Delta Drone). On mesure ici toute l’utilité sociale et écologique des drones.
Si tu suis l’actualité, tu as compris qu’après le développement durable, c’est la mode de la relocalisation qui a pris le dessus. Peu importe l’intérêt de la production, l’essentiel pour se faire bien voir quand on est un industriel est de fanfaronner qu’on crée des emplois en France. Le big boss de Delta Drone ne s’en prive pas : « ‘‘Pour être précis, 80 % du drone est produit ici à Grenoble, 10 % sont produits dans la région Rhône-Alpes et les derniers 10 % sont issus du reste du monde’’ précise Frédéric Serre, PDG de la société, spécialisé dans le lancement de produits innovants, dont la grand-mère travaillait, il y a quelques décennies, dans ces mêmes lieux pour les chocolats Cémoi. ‘‘Je vais démontrer qu’on peut devenir riche en produisant en France et le drone deviendra le produit phare dans dix ans’’ nous avait-il lancé lors de notre première rencontre » (Le Daubé, 30/01/2013). Vive la surveillance « made in France » !
Outre les questions du non-sens des applications que les drones civils posent, c’est aussi celle de l’uniformisation des métiers, tous envahis par la technologie, qui s’impose. Avec le drone civil, le pisteur surveillant le manteau neigeux, l’exploitant agricole réalisant un « suivi de croissance » pour son blé, l’opérateur d’EDF inspectant les pylônes, et l’entraîneur de rugby font en réalité les mêmes gestes. Il stagnent tous derrière un écran, troquant leurs savoir-faire respectifs contre un métier standardisé. « La télécommande, instrument philanthropique, allait pouvoir débarrasser l’homme de toutes les occupations périlleuses. Mineurs de fond, pompiers, travailleurs de l’atome, de l’espace ou des océans, tous pourraient se reconvertir en téléopérateurs. Le sacrifice des corps vils n’est plus nécessaire » [8].
Tu t’en souviens peut-être : le premier drone qui a volé en France a été acheté par le ministère de l’Intérieur. En 2007 il a servi à surveiller les banlieues parisiennes pour collecter des informations sur d’éventuelles émeutes. Le drone est effectivement l’outil parfait pour la surveillance urbaine : « Les murs des villes, ces dernières décennies, se sont truffés de caméras de vidéosurveillance. La surveillance par le drone est plus économe : elle n’implique ni aménagements spatiaux, ni greffes sur le bâti. L’air et le ciel lui suffisent. Comme dans le film Eyeborgs, les caméras se détachent des murs, et ce faisant, il leur pousse des ailes et des armes. Nous entrons dans l’ère des panoptiques volants et armés » [9]. Pour l’instant, Delta Drone ne se positionne pas là-dessus. Selon la chargée de communication, « la société ne veut pas travailler dans la surveillance. On est prêt à aider les pompiers par exemple, mais pas les policiers » [10]. Mais comment ne pas imaginer, que dans quelques années, l’entreprise grenobloise se mette à louer ses drones à la police ou aux autorités locales pour survoler les villes ? Si c’est un marché porteur, qu’est-ce qui pourrait pousser ses dirigeants à ne pas le faire ? Le fait que Frédéric Serre ait déclaré qu’« il y a certains secteurs d’activité vers lesquels nous ne désirons pas aller. C’est une question d’éthique » (Le Daubé, 3/03/2013) ? L’éthique tient-elle longtemps quand on a décidé de gagner de l’argent en bourse ?
Si tu t’intéresses un peu à l’histoire, tu n’ignores pas que tant que nos sociétés resteront fidèles au Dieu Innovation, tout ce qui est techniquement possible finit tôt ou tard par se réaliser. Les spéculations sur les possibilités des drones font froid dans le dos : « Voir tout, tout le temps. Cette extension du champ de vision est en passe d’être confiée à de nouveaux dispositifs optiques révolutionnaires qui sont encore en phase de développement. Équipés de tels systèmes d’imagerie synoptique, un drone disposerait non plus d’une, mais de dizaines de micro-caméras de haute résolution orientées en tous sens, comme les multiples facettes d’un œil de mouche. Un logiciel agrégerait en temps réel ces différentes images en une seule vue d’ensemble, détaillable à volonté. On obtiendrait l’équivalent d’une image satellitaire de haute résolution, à l’échelle d’une ville ou d’une région entière, mais retransmise en vidéo ou en direct. À tout moment, les différentes équipes d’opérateurs pourraient, si elles le désiraient, zoomer sur tel quartier ou tel individu. Équipé d’un tel système, un seul appareil en vol stationnaire fournirait l’équivalent des capacités d’un réseau de caméras de vidéosurveillance disséminé à travers une ville entière. Le drone deviendrait ‘‘omni-voyant’’. En pratique, cependant on en est encore très loin » [11].
On ne sait pas encore si Delta Drone se mettra un jour à fabriquer des drones pour la « surveillance urbaine », voire si la société finira par opter pour la production de drones militaires, pour éviter à la France la honte d’être obligée de faire ses emplettes militaires aux États-Unis. Même si elle reste dans un cadre strictement civil et « éthique » (sans servir à la surveillance), son existence participe du même élan, du même rayonnement d’une société de surveillance encore et toujours plus perfectionnée. Ces innovations ne simplifient pas la vie : elles la rendent toujours plus dépendante de la technologie. Vouloir remplir le ciel d’engins motorisés, c’est accélérer la colonisation d’un des espaces naturels les moins envahis.
On n’a pas besoin de drones dans notre ciel, on aime tellement les choucas, les mouettes rieuses et les hirondelles